Vers une meilleure reconnaissance du rôle du biologiste médical en matière de prévention
La prévention est au cœur du plan gouvernemental Ma santé 2022. Elle l’est aussi des JIB 2019. En raison même de la nature de leur spécialité médicale, les biologistes médicaux font du dépistage et de la prévention au quotidien. Cette mission est aujourd’hui peu valorisée. Avec l’évolution du système de santé et les innovations en matière de diagnostic, cela devrait changer et son rôle dans les campagnes et démarches de prévention est appelé à se renforcer.
« À ce jour, le biologiste médical n’a jamais été mis en avant pour son activité dans le domaine de la prévention alors qu’il en fait au quotidien, ne serait-ce que dans le cadre du dépistage, insiste Virginie Ferré, Présidente du comité scientifique français des JIB 2019, virologue au CHU de Nantes et Professeur des Universités à l’UFR des Sciences pharmaceutiques et biologiques de l’Université de Nantes. Cette activité n’est paradoxalement pas réellement identifiée comme étant l’apanage des biologistes médicaux et faisant partie à part entière de leur champ de compétences. »
La raison ? « Le biologiste médical est dépendant de la prescription d’un médecin, répond le Professeur Ferré. Il n’a jusqu’ici pas la possibilité d’effectuer de sa propre initiative des actes de prévention. Il serait normal et bénéfique à la santé publique que cela change. »
« Les laboratoires de biologie médicale ont peu de retours sur l’impact de leur contribution »
Résultat, jusqu’ici, le biologiste médical est souvent cantonné au rôle de fournisseur d’analyse sans être réellement impliqué dans les démarches globales de dépistage et de prévention. Pourtant, les biologistes médicaux proposent un maillage territorial essentiel. Les laboratoires de biologie médicale produisent les données biologiques des patients : une mine pour toutes les politiques de dépistage, mais aussi de prévention et de vigilance sanitaire conçues et promues par les autorités, via Santé publique France. Les biologistes médicaux sont mal récompensés de leurs efforts. « Les LBM ont peu de retours sur l’impact de leurs contributions en matière de prévention et des suites qui leur sont données, notamment de la part des ARS. Cela ne leur permet malheureusement pas d’être plus investis en matière de prévention primaire vers les patients », regrette la virologue au CHU de Nantes.
Mieux valoriser leur participation
Rectifier le tir ne serait pourtant pas très compliqué. Par exemple, suggère le Professeur Ferré, le Bulletin épidémiologie hebdomadaire (BEH) pourrait utilement mentionner qu’ils sont à l’origine de certaines données. « Ce serait là la reconnaissance du maillage territorial que les laboratoires assurent et de la mission parfois chronophage qu’ils assument en participant aux déclarations obligatoires de pathologie. »
Autre piste sérieusement étudiée : donner aux biologistes médicaux plus d’autonomie en matière de prévention et de dépistage et la possibilité d’être à l’initiative d’examens biologiques lorsqu’ils estiment que les signes cliniques et biologiques d’un patient le requièrent. La proximité des LBM de ville auprès des populations est ici un atout précieux dans la mesure où, précise Virginie Ferré, « les gens ne se rendent pas forcément à l’hôpital pour se faire dépister ».
Prévention secondaire et tertiaire
Les biologistes médicaux y sont prêts. D’autant que, sur le terrain, les biologistes médicaux participent déjà à la prévention. Ils interviennent en prévention secondaire, via des examens de dépistage, essentiellement pour ce qui est des pathologies infectieuses et métaboliques ainsi que pour le diabète.
Ils ont également un rôle important en prévention tertiaire, laquelle a trait aux complications et aux risques de récidive. Là, les biologistes assument un rôle clinico-médical de suivi des pathologies, mais aussi en informant les patients sur les risques de transmission.
Aller plus loin et mieux intégrer les biologistes médicaux aux campagnes officielles fait son chemin. « Le ministère de la Santé et Santé publique France entendent maintenant mettre l’accent sur la prévention et sont prêts à ce que tous les acteurs du système de santé investissent ce champ », assure le Professeur Ferré. Reste à régler le problème du modèle économique. Les syndicats représentatifs de la profession en discutent depuis plusieurs lois tant avec le ministère qu’avec l’Assurance maladie. Autant de pistes qui seront abordées lors des conférences des JIB 2019.
Le Professeur Jean-Michel Halimi est néphrologue, Chef de service au CHU de Tours. Il travaille étroitement avec les biologistes médicaux hospitaliers et libéraux dans le cadre du dépistage et du suivi des patients atteints d’Insuffisance rénale chronique (IRC). Pour lui, l’innovation en biologie doit autant favoriser le dialogue entre le biologiste et le médecin que des rendus de résultats qui améliorent la fiabilité du diagnostic.
Le dépistage et la prise en charge des patients atteints d’Insuffisance rénale chronique (IRC) feront l’objet de deux rendez-vous lors du Congrès :
- L’un s’interrogera sur le fait de savoir si la créatinine plasmatique sera encore le gold standard demain ?
- Le second permettra de découvrir les dispositifs mis sur pied par les URPS de biologistes Centre-Val de Loire et PACA avec les médecins pour optimiser le dépistage et le suivi de l’IRC.