Les antibiogrammes ciblés pour lutter contre l’antibiorésistance
Lors des JIB 2019, un atelier sera consacré à l’antibiothérapie ciblée. Focus sur cette pratique encore peu répandue en France, qui pourrait toutefois participer efficacement à la lutte contre l’antibiorésistance.
« Aujourd’hui, de nouvelles résistances bactériennes se multiplient, en ville, comme à l’hôpital, et poussent les médecins à utiliser des antibiotiques toujours plus puissants, lorsqu’ils existent. L’usage répété de ceux-ci contribue aussi à renforcer l’émergence de résistances », rappelle le ministère de la Santé sur son site Internet(1). Or, sur ce point, les biologistes médicaux hospitaliers et libéraux peuvent agir.
Liste limitative d’antibiotiques
Comment ? « En proposant, en fonction du contexte clinique et des résultats des examens des patients, une liste limitative d’antibiotiques adaptés et non un catalogue comme nous le faisons actuellement, évoque Francis Guinard, membre du comité scientifique des JIB 2019 et biologiste médical à Saint-Doulchard (Centre-Val de Loire). Cela limiterait la prescription à des antibiotiques réellement pertinents pour la cible en question, dans le contexte considéré, tout en épargnant autant que possible les antibiotiques critiques. »
En cas d’infection urinaire aiguë sans signe de gravité, par exemple, « nous pouvons commencer par conseiller la fosfomycine et le pivmécillinam, deux molécules d’une très grande efficacité et pour lesquelles il y a peu de résistance, notamment pour Escherichia coli », voire « la nitrofurantoïne et, éventuellement, le Bactrim », complète-t-il. Et ce, afin de réduire la prescription de céphalosporine de 3e génération (C3G) et de fluoroquinolone, vis-à-vis desquelles les bactéries développent des résistances.
Des discussions avec la CNAM
Bien entendu, cela suppose, pour les biologistes médicaux, de disposer de renseignements précis sur les antécédents et le contexte clinique des patients (l’examen souhaité est-il demandé pour une infection ponctuelle ou une récidive ? simple ou compliquée ? la patiente est-elle enceinte ? etc). « Peut-être faudra-t-il interroger les patients et leur médecin pour les obtenir. Mais c’est à ce prix que nous pourrons réduire l’antibiorésistance », insiste M. Guinard.
La généralisation des antibiogrammes ciblés, en ville comme à l’hôpital, est d’ailleurs l’un des objectifs du ministère de la Santé et de l’Assurance maladie. Ils y voient un intérêt médical mais aussi économique puisque, en première intention, seraient privilégiés les antibiotiques génériqués, dont le coût est moindre par rapport aux antibiotiques critiques. C’est pour cette raison que la Cnam œuvre actuellement, avec les syndicats de biologistes médicaux, à l’élaboration, d’ici l’an prochain, d’une rémunération pour les professionnels qui, en ville, réaliseront des antibiogrammes ciblés. « Celle-ci prendrait la forme d’une rémunération sur objectifs de santé publique (Rosp) », précise François Guinard, membre de ce groupe de travail. Un sujet qui sera largement abordé lors de l’atelier des JIB 2019.
(1) https://solidarites-sante.gouv.fr/prevention-en-sante/les-antibiotiques-des-medicaments-essentiels-a-preserver/des-antibiotiques-a-l-antibioresistance/article/l-antibioresistance-pourquoi-est-ce-si-grave
Le Professeur Jean-Michel Halimi est néphrologue, Chef de service au CHU de Tours. Il travaille étroitement avec les biologistes médicaux hospitaliers et libéraux dans le cadre du dépistage et du suivi des patients atteints d’Insuffisance rénale chronique (IRC). Pour lui, l’innovation en biologie doit autant favoriser le dialogue entre le biologiste et le médecin que des rendus de résultats qui améliorent la fiabilité du diagnostic.
Le dépistage et la prise en charge des patients atteints d’Insuffisance rénale chronique (IRC) feront l’objet de deux rendez-vous lors du Congrès :
- L’un s’interrogera sur le fait de savoir si la créatinine plasmatique sera encore le gold standard demain ?
- Le second permettra de découvrir les dispositifs mis sur pied par les URPS de biologistes Centre-Val de Loire et PACA avec les médecins pour optimiser le dépistage et le suivi de l’IRC.